Takarazuka – Lady Oscar version paillettes nippones

Ou la révision de l’Histoire (française) par les Japonais (et c’est d’actualité ce mois-ci).

C’est bien connu, la théorie des genres s’affirme tout autant qu’elle se brouille dans la société japonaise : la télé regorge de personnages androgynes mais l’homosexualité est totalement tabou dans le pays, la place de l’homme dans la cellule famille est sur le canapé et celle de la femme en cuisine, les femmes aiment les éphèbes sortis de chez la manucure alors que les hommes préferent des gamines candides sorties du bac à sable…j’en passe, la liste est longue…

On ne sait plus trop qui est quoi mais tout le monde y trouve son compte. Et c’est avec ça en tête que je suis allée voir une comédie musicale de la Takarazuka Revue, à Takarazuka pas loin d’Osaka, en Mai. Et alors? Eh ben, Takarazuka Revue est une revue très connue au Japon car ses spectacles sont joués par des femmes exclusivement, et donc même les rôles d’homme (otoko yaku).

On sait que le Japon a une longue tradition de scène où dans certains arts, les artistes sont uniquement des hommes ou uniquement des femmes (lire l’histoire du kabuki pour en avoir un aperçu). Mais je vous assure, quand on est pas habitué, on ouvre grand les yeux. J’avais quand-même une bonne raison pour aller tenter l’expérience: la revue fête ses 100 ans (en passe de devenir du théâtre classique japonais donc) et reprend un de ses spectacles phare: La Rose de Versailles (ベルサイユのばら ou Lady Oscar en français), adapté du manga du même nom de Ikeda (qui a supervisé la production elle-même!!). Donc, je suis allée voir un spectacle de revue où les femmes jouent des rôles d’homme et de femmes qui se font passer pour des hommes…Takarazuka Inception.

Ce spectacle de revue, et particulièrement Lady Oscar, est extrêmement populaire. La salle était comble et j’avais eu beaucoup de mal à réserver une place 2 semaines à l’avance. Et le public est presque exclusivement féminin. En fait, un public de…grand-mères si vous voulez savoir. 90% du public était des femmes certes, mais d’un certain âge. Je ne saurais l’expliquer. Peut-être le clinquant de l’édifice, le charme de ces actrices grimées autant en homme qu’en femme, les costumes soignés à la perfection, etc…? Au final, tout est féminin à l’extrême. Ca sentait même la rose dans la salle, sans rire !!

Je me suis installée et le spectacle a commencé. Je m’attendais à ne pas comprendre un mot du spectacle mais je comptais sur tout le reste pour appréhender l’histoire qui avait pour personnage centrale le Comte de Fersen. Les 5 premières minutes ont fait le show: des paillettes, du rose, des froufrous pour planter le décor de Versailles version music hall, puisque c’est ce que Takarazuka est. Mais j’espérais que ça ne serait pas comme ça jusqu’à la fin.

Y avait 2 actes (Ah? Euh, mais j’ai des choses à faire aussi cette après-m…), le 1er était sympa malgré des dialogues un peu longuets. Les chansons étaient exactement du même genre que celles…qui plaisent aux grand-mères à la télé JP. Plutôt Chance aux Chansons qu’enka en fait. Pareil pour la musique. Bon, ok, je suis pas fan mais ça ira.

Et puis, la Oscar, elle a commencé à virer nunuche geignarde vers la fin du 1er acte pour carrément devenir cœur d’artichaut au début du 2nd acte, à dire qu’elle aime Fersen mais change d’avis quand André lui dit qu’il (elle?) l’aime lui aussi. Bref, cette 2ème partie m’a ennuyé au possible et ça a été le doute quand Oscar s’est écroulée en 20 coups de fusils (je vous spoile sans vous raconter haaaannn!!) après seulement 15 min de reprise, ce qui signifiait que l’histoire était finie. Je me suis demandée comment ils allaient combler jusqu’à la fin du spectacle (il reste 1h).

Eh bien avec des dialogues interminables dégoulinant de japoniaiserie entre une Marie-Antoinette en cellule de zonzon (spoil), un Fersen qui veut pas qu’on la décapite (spoil, spoil) et un Bernard qui dit merci à la Reine puis qui l’emmène à l’échaffaud (spoil, spoil, spoil). Puis ce fut fini et on a enchaîné sur une déferlante de french cancan à la Marseillaise dansé par des filles portant le costume de l’Oncle Sam (oui, c’est bleu blanc rouge, ça colle avec le drapeau français…), et des danseur/seuses (excusez, je ne sais plus…) en costumes qui n’avait rien à voir avec Versailles, pour revenir à des personnages emperruqués à la Louis XVI qui chantaient les louanges de Versailles, puis le salut des comédiennes.

Et enfin fini pour de vrai!! Ouf, 16h, je me suis de suite précipitée vers la sortie, suivie par une horde ménopausée, pour je ne sais trop quelle raison…

Mon avis reste très mitigé vis à vis du spectacle. En plus, c’est cher (j’ai payé 80€)…Les costumes et les décors sont fabuleux, les danses, les mimiques sont réglés à la perfection. Un vrai show entre le drame et la revue qui nous en met plein les yeux. Mais le jeu des actrices est horrible, elles jouent des caricatures d’hommes ou de femmes. L’actrice qui jouait Oscar avait une voix qu’elle cassait et qui m’était insupportable (j’ai cru qu’elle allait devenir aphone et devoir être remplacée pendant le spectacle, la déchéance totale pour une fille de la Takarazuka Revue).

C’était vraiment bien au début, j’ai accroché mais ça s’est fini en eau de boudin, loin du portrait que je me faisais d’Oscar et son amour de la liberté…Bah, j’en veux pas aux Japonais de fantasmer notre bonne vieille Révolution puisque le manga dont est adapté la revue est avant tout un roman de cape et d’épée. De toute façon, les spectacles de Talarazuka ne sont destinés qu’aux Japonais.